Passer d'une autoroute urbaine à un espace public

Recouvrir ou redistribuer?

Pour la construction d’infrastructures routières, les exigences techniques ne sont pas les seules en jeu. L’insertion de ces infrastructures dans le contexte urbain et paysager doit elle aussi être étudiée. Ce principe de base est communément accepté depuis une trentaine d’années.

Quant aux moyens de mettre en pratique une telle insertion, ils ont fait l’objet d’un nombre considérable d’études de la part des architectes et urbanistes. [1] Dans la littérature spécialisée et quelques projets récents, on distingue grosso modo deux méthodes de travail : d’une part, la dissimulation et le voûtement des infrastructures et d’autre part, une redistribution de l’espace en surface.

Le projet « De Groene Loper » (Le tapis vert) met l'autoroute à deux niveaux souterrains ; en surface sont realisés des espaces publics et un nouveau quartier urbain © A2 Maastricht

Des tunnels pour la traversée de l’A2 à Maastricht.
© A2 Maastricht

Recouvrement | Redistribution | Et la Petite Ceinture ?

Recouvrement

Un recouvrement consiste à « enterrer » les infrastructures routières et à assigner l’espace ainsi libéré en surface à d’autres finalités. La présence de la voiture et les nuisances qu’elle provoque sont dissimulées à la vue (et aux autres sens). Les barrières physiques disparaissent, tandis que l’aménagement de places et de parkings augmente la qualité de l’environnement. Souvent, des possibilités de nouveaux projets immobiliers voient également le jour.

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Redistribution

Dans cette approche, l’espace disponible est redistribué au bénéfice de la fonction de séjour et des modes de transport actifs. L’approche se base sur la notion de « demande latente de trafic » : l’infrastructure induit la circulation.

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Avenue Victoria Régina dans le Jardin Botanique © Rien van de Wall

Un recouvrement de l’avenue Victoria Régina ne fera pas disparaître cet embouteillage.
© Rien van de Wall

Et la Petite Ceinture ?

À Bruxelles, préserver la capacité et la fluidité du trafic sur les axes structurants reste aujourd’hui encore un objectif politique de première importance. [15] Si l’on souhaite dans le même temps améliorer la qualité de l’habitat le long de ces axes, des interventions de recouvrement s’imposent. Ce raisonnement, déjà en vogue dans les années 1980, est à l’origine de la construction du tunnel Léopold II. [16] Les récentes études de faisabilité pour le recouvrement de la Petite Ceinture à hauteur de Botanique et entre Louise et Trône poursuivent cette politique. [17]

La construction de nouveaux tunnels ne constitue cependant pas une solution efficace pour une artère intra-urbaine comme la Petite Ceinture. Un recouvrement perpétue les vieilles habitudes en matière de mobilité, produit des effets positifs pour la qualité de vie à une échelle extrêmement localisée et entraîne des frais de construction et d’entretien très élevés sur une longue période.

Profil boulevard Léopold II

Le tunnel Léopold II est partiellement mis hors service. Profil transversal du réaménagement proposé.
© Rien van de Wall & Wim Menten

Des projets de recouvrement se justifient pour des (auto)routes de transit présentant un intérêt national et international, c’est-à-dire des voies qui possèdent une fonction de jonction importante. La Petite Ceinture agit quant à elle comme un collecteur de trafic : d’une part, elle draine les navetteurs en provenance ou à destination de la zone de bureaux la plus vaste du pays, d’autre part, elle rassemble et distribue le trafic intra-urbain. Pour ces deux types de déplacements, des formules innovantes sont mises en pratique dans le monde entier : elles développent les transports en commun et le vélo pour en faire des alternatives dignes de ce nom, attrayantes et complémentaires. Il n’y a pas de raison de penser qu’à Bruxelles, il ne serait pas possible d’explorer de nouvelles pistes dans cette optique. PetiteCeinture.be entend amorcer ce type de piste.

La redistribution spatiale proposée va de pair avec une modification des fonctions de circulation des boulevards. Cette modification est envisageable si le rôle des boulevards dans le tissu urbain et le réseau routier est redéfini et si l’intervention sur l’espace est intégrée dans un plan de mobilité multimodal. [18]

Carrefour rue Blaes

Carrefour de la rue Blaes. Visualisation.
© Wim Menten

Dans la proposition, le réaménagement des boulevards à l’échelle locale fait partie intégrante d’un processus qui remodèle la mobilité dans la région métropolitaine au sens large. En même temps, il peut servir de vitrine pour cette transition. La proposition réunit les univers, souvent distincts, de la mobilité et du développement territorial, pas uniquement parce que cette convergence bénéficie aux deux, mais aussi parce qu’il n’est pas possible de faire autrement.

Le réaménagement ouvre entre autres des perspectives pour de nouveaux lieux de vie, de détente et de rencontre et de nouveaux espaces verts dans les quartiers du centre, fortement bétonnés. Mais en plus, toute intervention sur la circulation entraîne un effet boule de neige sur la mobilité dans la région métropolitaine au sens large et génère des bénéfices sociaux, économiques et environnementaux pour une zone qui dépassent le simple périmètre de l’intervention.